EXERCICE >> 1. Lisez « Les investigations et leur usage ».

LES INVESTIGATIONS ET LEUR USAGE

D’un jour à l’autre ou d’une semaine à l’autre, chacun peut être confronté à des circonstances fâcheuses ou indésirables. D’une façon ou d’une autre, chacun s’arrange pour endurer ces situations, convaincu qu’il n’y a pas grand-chose à faire pour améliorer son sort. Peut-être s’agit-il d’un projet que l’on a planifié pendant des mois au travail et qui ne donne pas les résultats escomptés, ou bien est-ce la productivité au bureau qui a dégringolé au cours du dernier trimestre, ou encore les travaux d’agrandissement de la maison qui prennent plus de temps que prévu. Ce genre de situations est monnaie courante pour bon nombre d’entre nous.

Mais, ces situations n’ont pas pour autant besoin d’être des choses courantes. Il est possible de mener une existence heureuse et d’atteindre ses objectifs dans n’importe quel domaine de la vie : sur le plan individuel, familial, professionnel, etc. Les buts que chacun a envisagés un beau jour pour lui-même peuvent aussi devenir des réalités. 

Chaque fois qu’un objectif n’est plus en voie d’être atteint ou qu’une situation se dégrade ou empire, il existe une bonne raison à cela, qui peut être localisée. C’est une idée que, bien souvent, les gens ne réalisent pas : en réalité les choses sont causées. Elles n’arrivent pas toutes seules. Il existe des raisons derrière chaque situation – des raisons que les gens eux-mêmes peuvent contrôler. 

À défaut de savoir cela, l’Homme se repose souvent sur le « destin », la superstition, les diseuses de bonne aventure ou l’astrologie pour déterminer son sort ou son avenir. Nombreux sont ceux qui se contentent d’espérer en vain que rien d’autre ne se mette à aller de travers ou qui s’abusent en adoptant pour croyance que la vie n’est ordinairement que lutte incessante. 

Ainsi en va-t-il, par exemple, du fermier qui n’a pas d’explication plausible de sa très mauvaise récolte de l’année. Il n’a pas la moindre idée d’avoir pu causer lui-même cette condition. Pourtant, quand on cherche, on découvre finalement qu’il n’avait pas pris soin de mettre son grain en lieu sûr pour les semailles de printemps, et que celui-ci est devenu la proie des insectes. Ne le sachant pas, il risque de conclure à toutes sortes d’étranges « raisons » ou d’attribuer tout simplement son sort à la malchance. 

Dans une usine peu productive, on voit la direction transférer le personnel, embaucher de nouveaux ouvriers, etc., dans l’espoir de voir la productivité augmenter avant que l’entreprise ne coule. Mais les cadres n’ont pas toujours les compétences ou le savoir-faire nécessaires pour examiner vraiment le fonctionnement de l’entreprise et trouver ce qui cause la situation. En inspectant la situation, on découvrira finalement que le fournisseur des matières premières a refusé de livrer parce que la comptabilité de la société ne payait pas les factures. 

Savoir examiner, corriger et améliorer des situations comme celles-ci, dans quelque domaine de la vie que ce soit, requiert des compétences en investigation – une aptitude à penser logiquement et à aller jusqu’au fond des choses.

Une investigation (ou enquête) consiste à découvrir et à trier minutieusement des faits. En investiguant, on recherche et on examine les circonstances ou aspects particuliers d’une chose pour essayer de découvrir les faits, et notamment pour essayer d’isoler une cause. 

Une investigation bien faite va au fin fond des choses auxquelles on a affaire. Dans une organisation quelconque, on observe par exemple que la production est en baisse. C’est une situation non optimale qui mérite une investigation afin que la cause en soit localisée. On peut également faire bon usage des investigations dans la vie personnelle d’un individu afin d’en améliorer les conditions. 

En faisant une investigation, la chose à faire, c’est de se poser la question : « Qu’est-ce que je ne comprends pas ? » par rapport aux conditions existantes. Vous découvrirez que deux faits ne s’accordent pas; ils se contredisent et ne sont pas compréhensibles. Vous essayez donc de trouver une raison qui explique ces deux faits : vous posez des questions sur ces deux faits et vous allez obtenir un autre point que vous ne comprenez pas. Et quand vous essayez de comprendre ce point-là, vous tombez alors sur un autre fait que nous n’arrivez pas à comprendre. Et quelque part en suivant ce fil (en référence au fil d’Ariane), vous allez trouver la raison qui élucide les circonstances sur lesquelles vous êtes en train d’investiguer. 

Toute investigation devrait procéder de cette façon. Parfois, cela demande de nombreuses questions ; d’autres fois, il suffit d’un : « Qu’est-ce que c’est que ce bruit ? » pour remonter jusqu’à la source de la difficulté. Voici un exemple d’investigation rapide dans une situation d’urgence : un mécanicien est de garde dans la salle des machines d’un bateau. Ses perceptions sont normales, mais aiguisées par l’expérience : il observe la zone. Il entend un « pssss » anormal : voilà quelque chose qui ne correspond pas à des conditions escomptées dans une salle des machines. Il parcourt l’endroit des yeux mais ne voit rien qui cloche à part un petit nuage blanc. Il combine la vue à l’ouïe, s’approche pour regarder ; il voit qu’une soupape a sauté ; il coupe la vapeur. 

En deux mots, a) quelqu’un s’aperçoit d’un dysfonctionnement d’une portion d’une organisation ou d’une activité quelconque sur laquelle il enquête ; b) il trouve quelque chose qu’il ne comprend pas et c) il questionne les individus de ce secteur lié au dysfonctionnement ou examine la zone pour obtenir plus de données. 

En suivant cette séquence, on parvient à isoler la cause du problème qui peut alors être résolu, de façon que la zone en question se remette à fonctionner correctement. Dans le cas d’une organisation, on peut se contenter d’exécuter ces trois étapes maintes et maintes fois, et ce sera généralement tout à fait suffisant pour la maintenir dans un fonctionnement régulier et satisfaisant. 

Les statistiques jouent un rôle dans les investigations. Une statistique montre la production d’une activité, zone ou organisation par rapport à un moment antérieur. Elle reflète le fait qu’une zone atteint ou non son but : si les statistiques montent, c’est qu’elle accomplit plus efficacement ce qui est attendu d’elle. Quand on fait une investigation, on cherche les statistiques en baisse. Celles-ci sont incompréhensibles, bien entendu, aussi questionne-t-on les gens concernés. Dans leurs réponses, il y aura quelque chose qui n’a pas de sens aux yeux de la personne qui enquête – par exemple : « Nous ne pouvons pas payer les factures parce que Marguerite a suivi un cours. » L’investigateur ne cherche que des choses qu’il ne parvient pas lui-même à concilier avec le reste. Il questionne alors la personne qui lui a donné cette donnée et la Marguerite en question. Tôt ou tard, la vraie raison apparaîtra. 

À mesure qu’on suit le fil de ce qu’on ne comprend pas, l’une de ces deux choses suivantes peut se produire. Soit il s’agit d’une impasse qui ne mène nulle part, auquel cas on reviendra au fil principal de l’investigation, soit cela produit matière à davantage de recherche. Et si cela produit matière à davantage de recherche, on découvrira d’autres choses que l’on n’arrive pas à comprendre. 

Le truc dans cette procédure consiste à trouver un bout de fil qui dépasse – quelque chose que l’on ne comprend pas – et à le suivre à force de questions. Un petit chat apparaît. Suivez le fil en posant d’autres questions. Un bébé gorille apparaît. Suivez-le un peu plus loin. Un tigre apparaît. Suivez-le encore et oh là là ! vous êtes tombé sur la Grosse Bertha ! 

Quand on rencontre deux faits contradictoires, on pose des questions au sujet de ces deux faits et on obtient un autre point que l’on ne comprend pas. On suit alors le fil de ce qu’on n’arrive pas à comprendre jusqu’à ce qu’on découvre la vraie raison.   

Le fait d’être paresseux ou stupide n’est pas quelque chose de raisonnable. Derrière ces raisons, vous trouvez la vraie cause de l’inaction d’une portion d’une organisation ou d’un bouleversement qui n’en finit pas.

Quand vous avez votre « Grosse Bertha », vous pouvez agir. 

Il y a toujours une raison derrière une mauvaise statistique. Questionnez ceux qui sont impliqués dans l’affaire jusqu’à ce que vous aperceviez la véritable raison. Cela ne sera jamais : « Agnès est un peu sotte. » Ce serait plutôt qu’Agnès a été embauchée comme dactylo alors qu’elle ne savait pas taper à la machine ou encore que le chef du département ne vient tout simplement jamais travailler. 

La véritable explication d’une statistique basse est toujours quelque chose de très facile à comprendre. Si vous posez suffisamment de questions, vous trouverez la véritable explication et pourrez alors agir. 

Cette technique d’investigation, quoique élémentaire, est terriblement efficace. Elle peut être appliquée aux situations simples comme aux situations complexes pour aller au fond des choses et pouvoir ainsi résoudre les situations et améliorer les conditions de vie. 

Les compétences en matière d’investigation viennent avec la pratique. Chacun peut les cultiver et les développer au point de devenir capable de localiser instantanément les choses qu’il ne comprend pas. Cette aptitude n’est pas innée mais peut s’acquérir facilement. Pour accélérer les investigations et les rendre encore plus efficaces, il faut comprendre et pouvoir appliquer les principes de la logique – un sujet qui jusqu’à présent a non seulement été incompris, mais rendu inutilement complexe.